
Faire comprendre la simplification de circuits quantiques à des personnes qui n’ont aucune connaissance en informatique ou en mathématique, c’est le défi que Colin Blake, doctorant Inria, a décidé de relever lors de la Scientific Game Jam. Essai réussi : Les Chevaliers du quantique, le jeu développé à partir de ses travaux de recherche, a remporté le 1er prix du jury.
Depuis qu’il a rejoint fin 2024, et en tant que doctorant, l’équipe MOCQUA, commune avec le CNRS et l’Université de Lorraine et rattachée au laboratoire Loria, Colin Blake a une idée en tête : « Faire en sorte qu’à la fin de ma thèse, mes parents et ma compagne arrivent à comprendre ce que je fais. » Un projet ambitieux de la part d’un spécialiste du développement des théories équationnelles pour les circuits quantiques, notamment les systèmes qudits. Attaché à la transmission et à la vulgarisation, c’est dans une démarche de médiation scientifique que Colin s’est inscrit à la Scientific Game Jam, un marathon de création de jeux vidéo organisé du 28 février au 2 mars au Féru des sciences de Jarville-la-Malgrange (54), par les musées scientifiques de la Métropole du Grand Nancy en partenariat avec Mines Nancy Artem, l’Université de Lorraine et l’Institut Jean Lamour.
« L’intérêt de la Scientific Game Jam est de réunir des doctorantes et doctorants issus de tous les domaines de recherche, et des graphistes ou game designers autour d’un projet de médiation scientifique ludique. La qualité des quatre jeux primés, très divers dans leur contenu comme dans leur forme, et l’enthousiasme du public ont fait de cette première édition une belle réussite. »
Sophie Toulouze, responsable évènementiel pour les musées scientifiques de la Métropole du Grand Nancy
Simplifier des circuits quantiques en s’amusant
Lors de cet évènement, des doctorants disposaient de 48 heures pour créer un jeu vidéo autour de leur thématique de thèse. Aux côtés de onze autres candidats, Colin a ainsi présenté son projet, « bricolé en deux heures sous forme de puzzle découpé dans trois feuilles A4 », à la trentaine de game designers, développeurs et graphistes présents, dont quatre* ont décidé de le rejoindre. « C’est un vrai travail d’équipe. La graphiste a proposé des idées de scénarisation et un univers médiéval auxquels je n’avais pas du tout pensé. Quant aux développeurs, ils ont pris énormément de liberté sur ce qu’ils ont implémenté pour arriver à un résultat qui me semblait a priori très compliqué à atteindre. »
Le résultat en question ? Les Chevaliers du quantique, un jeu disponible en ligne dans lequel il faut défendre un royaume contre des assaillants de plus en plus menaçants à l’aide d’un sceptre « aux pouvoirs immenses mais soumis aux règles quantiques » confié par la magicienne Ratafiel. « Sans le savoir, les joueurs manient des principes de simplification de circuit qui s’appuient sur des équations issues de la littérature la plus récente sur le sujet. »
« Une excellente expérience humaine et scientifique »
Le jeu a séduit non seulement le jury qui, sur la base de cinq critères d’appréciation – respect du thème, scénario, gameplay, direction artistique, médiation –, lui a attribué le 1er prix, mais également le public. « Des enfants d’école primaire en visite au Féru des sciences l’ont testé et ont réussi à finir la partie » se réjouit Colin qui dresse de cette expérience un bilan très positif. « Le quantique est un sujet à la mode mais très compliqué car il repose sur des matrices énormes et fait appel à l’algèbre linéaire, ce qui explique qu’il soit peu abordé avant le niveau master. Il y a cependant une volonté émergente de simplifier son enseignement. Ce genre d’initiative y participe pleinement et c’est une très bonne chose. »
* Sarah Dépernet, graphiste et sound designer ; Garance Sempéré, graphiste ; Jean-Loup Martin et Yoni Rigaut, développeurs.
Parmi les membres du jury figuraient Sabah Khalfa, cheffe de projet et ingénieure pédagogique chez Inria, et Martin Vassor, maître de conférences dans l’équipe VeriDis, commune avec le CNRS et l’Université de Lorraine et rattachée au laboratoire Loria.
